e cigarette beaucoup de bruit pour rien
Une "étude" prétend que dans certaines
conditions, la e-cigarette pourrait s’avérer "5 à 15 fois plus cancérigène
que le tabac". Sauf que ce travail publié dans le prestigieux New England Journal of Medicine est loin d'être
rigoureux... Décryptage.
E-cigarette : dans
quel cas (extrêmes) pourrait-elle être cancérigène ? ©ALCALAY
E-CIGARETTE. "Ce n’est pas une
étude scientifique, c’est une lettre torchon. D’habitude leNew England Journal of Medicine
(NEJM) est un journal sérieux, mais là ils ont adopté le
comportement d’un tabloïd." Le Pr Bertrand Dautzenberg, pneumologue et président de l'Office français de prévention du
tabagisme ne mâche pas ses mots pour qualifier le texte publié dans
l’une des plus prestigieuse revue médicale du monde.Les auteurs y
expliquent que la cigarette électronique pourrait s'avérer "5 à 15
fois plus cancérigène que le tabac". Une annonce qui a
évidemment fait l'effet d'une bombe au moment de sa parution le 22 janvier
2015. Un texte dont il convient d'abord de rappeler le
statut : il ne s'agit pas d'une étude présentant méthodologie, contexte,
observations... mais d'une lettre - ou "correspondance" - qui
n'a donc pas valeur de publication scientifique.
Ce qui leur permet d'arriver à
une conclusion aussi alarmiste ? "Nous avons constaté que
du formaldéhyde peut se former durant le processus de vaporisation des
cigarettes électroniques", écrivent ces chercheurs de
l'université d'Etat de Portland (Oregon, nord-ouest). Cette substance qui est
un cancérogène avéré apparaitrait lorsque le liquide est surchauffé à
partir d'une batterie dégageant plus de 5 volts de tension. Une observation qui
ne tient pas la route quand on sait un peu comment fonctionne
une cigarette électronique (voir notre infographie ci-dessous pour
les connaissances de base) que celle-ci soit jetable ou non.
Sans
résistance, la puissance n'est rien
En effet, utiliser une batterie
délivrant une tension de 5 volts ne dit strictement rien de la puissance de la
e-cigarette (qui elle est exprimée en watts), et donc de la chaleur dégagée
pour chauffer le liquide. En effet, la puissance est fonction du couple
batterie/résistance. D’un côté, la tension délivrée par la batterie se mesure
en volts. De l’autre, la capacité de la résistance s'exprime en ohms (noté Ω). La puissance en watts est en fait égale au carré de la
tension divisé par la résistance. Ainsi, avec une tension de 3,2 volts et une
résistance de 1,5 Ω, on obtiendrait : (3,2 × 3,2) ÷ 1,5 =
6,82 watts. Le tableau ci-dessous établit la puissance obtenue en fonction de
ces deux paramètres :
Mais dans leur correspondance
adressée au NEJM, les chercheurs utilisent une résistance de 2,1 Ω,
associée à une batterie dont la tension est de 5 volts. Soit : (5 ×
5) ÷ 2,1 = 11,90 watts. Or, il est vrai qu'au delà d'une certaine
puissance, la température à laquelle est chauffé le liquide est telle
qu'elle peut produire du formaldéhyde. Mais - faut-il le rappeler - toutes les
formes de combustion produisent cette substance cancérogène. Qu’il s’agisse d’incinérateurs de
déchets, de chauffage des bâtiments ou, plus simplement, d'un feu de bois,
de l’utilisation d’encens ou la cuisson d’aliments (votre four, votre poêle, ou
le barbecue). "Dans ce cas là, autant interdire la
vente de poêle et de côtelettes", ironise le Pr Dautzenberg
qui, en fait, ne décolère pas de voir de telles annonces passer dans le New England Journal of Medicine.
Evidemment donc, si les
"vapoteurs" choisissent une batterie délivrant une tension de 7 volts
en l'associant à une résistance de 1,5 Ω, ces derniers prennent le
risque de s'exposer plus que de raison à cette substance puisque la puissance
de chauffe sera égale à 32,66 watts. Mais le risque est-il plus important
que si l'on mange des saucisses bien grillées ? Cela pourrait être une
question intéressante... Sauf qu'avec une telle puissance de chauffe, le goût
et l'odeur dégagés par le dispositif sont tout simplement insupportables
pour un être humain normalement constitué. Le vapoteur a alors
l'impression d'aspirer une odeur de cramé.
Le tabac, c'est 78
cancérogènes avérés...
Last but not least, les auteurs affirment qu'avec
ce formaldéhyde détecté dans les conditions ci-mentionnées la cigarette
électronique pourrait être 5 à 15 fois plus cancérigène que le tabac. Une
aberration, pour le Pr Dautzenberg qui rappelle que "la plupart des
cancérogènes de la cigarette classique provient des goudrons issus de la
combustion." Une affirmation qui par ailleurs, et de façon
inexplicable, fait fi des 78 autres substances cancérogènes contenues dans le
tabac. Des produits toxiques rigoureusement
L'infographie parle d'elle-même :
et d'ici à ce qu'on trouve autant d'agents toxiques dans la e-cigarette qu'il
n'y en a dans le tabac... Il est certes bien naturel que la science
étudie d'éventuels effets négatifs de lacigarette électronique étant donné la relative
nouveauté de ces dispositifs. Encore faut-il le faire avec un minimum de
sérieux.

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